Les colonnes : rôle de soutien

Les colonnes

François Varin, article du magazine Continuité, octobre 2010
Qu’elles soient à l’intérieur ou à l’extérieur, les colonnes jouent d’abord un rôle de soutien. Et lorsqu’elles sont apparentes, elles sont souvent de surcroît… coquettes! Beautés à protéger.

Le système de poutres et colonnes permet de dégager les espaces. Ces éléments remplacent avec plus de légèreté certaines cloisons et murs de refend, entraînant des aménagements diversifiés et davantage d’ouvertures. À l’extérieur, les colonnes rendent possible la construction de galeries ouvertes ou fermées, de coursives, de vestibules et de portiques. Installées en appentis au bâtiment principal, ces composantes doivent leur stabilité à une structure faite d’un assemblage de pièces où sont appliqués les principes du porte-à-faux, de la triangulation ou du support contreventé, tel que le permet l’ossature de poutres et poteaux. L’ossature de la toiture de ces éléments repose sur les colonnes, qui reportent la charge au sol et permettent ainsi de créer des espaces invitants ouverts sur l’extérieur, une transition agréable entre la nature et l’intérieur. Lorsque l’architecture est devenue une façon d’affirmer sa fortune et de démontrer son hospitalité, ces éléments d’accueil ont pris, grâce à la colonne, plusieurs formes et profils.

L’utilisation de la colonne a ainsi contribué au développement stylistique de l’architecture. Elle a stimulé la conception de composantes architecturales qui modulent le carré original du bâtiment, lui apportant une nouvelle volumétrie et un cachet particulier.

Détails de conception

Au Québec, aux XVIIe et XVIIIe siècles, les premières colonnes étaient faites de bois massif de forme carrée, ronde ou à fût conique. Les connaissances empiriques des bâtisseurs faisaient en sorte qu’ils préféraient les colonnes de fortes dimensions qui, croyaient-ils, supportaient plus adéquatement les charges. L’expérience, le développement des connaissances (notamment sur le comportement des matériaux) et la difficulté d’obtenir d’imposantes pièces de bois massif ont amené les constructeurs à créer des colonnes de bois évidées, rondes ou carrées, constituées de pièces de bois de petites sections. Ces nouvelles colonnes illustraient l’ingéniosité des assemblages : malgré la petite taille des pièces, elles assuraient une grande stabilité à l’ouvrage.

La colonne se compose d’un fût qui se termine au sol, d’une base et d’un chapiteau à sa tête. Parfois, la base repose sur un pilastre de pierre ou de brique, comme dans l’architecture du début du XXe siècle. Les colonnes sont habituellement dégagées structuralement. Cependant, elles peuvent être jumelées au plan du mur, voire engagées à l’intérieur, donnant l’impression de demi-colonnes.

Pour assurer de bonnes proportions et un aspect solide, la base sera plus large que le fût. Ce dernier sera d’une hauteur et d’un diamètre proportionnés par rapport à la façade, et le chapiteau assurera harmonieusement la transition entre la colonne et l’ouvrage qu’elle supporte.

L’architecture classique a inspiré la modénature des colonnes : celle-ci reprend les motifs ioniques, corinthiens, romains, doriques ou toscans, ou utilise simplement certaines moulurations typiques telles que le réglet, la baguette, le tore, la scotie, le quart-de-rond, la plinthe, etc.

Le fût de la colonne emprunte différents profils : conique, rond, carré et chanfreiné, rond et cannelé, galbé du bas, galbé du tiers, etc. Cette variété traduit la diversité des styles et des époques. Aussi, lors de travaux de rénovation, les colonnes trop abîmées devraient être remplacées par un modèle approprié, au profil comparable à l’original, pour un meilleur résultat. Malheureusement, les nouvelles colonnes sont souvent de section carrée et mal proportionnées, sans arêtes chanfreinées, offrant une impression de grande fragilité. Elles ne sont pas travaillées avec le souci du détail des colonnes d’origine. Parfois même, certains propriétaires remplacent les colonnes de bois par des colonnes de métal ou de pierre à cannelures, des modèles rarement compatibles avec le style ou la simplicité architecturale du bâtiment.

Pour entretenir et réparer

La question des proportions et des justes dimensions des colonnes demeure déterminante pour le maintien des qualités esthétiques et stylistiques du bâtiment. On devrait prendre davantage de soin à réparer ou à reproduire fidèlement le modèle d’origine et éviter le recours à des modèles vendus dans les grandes surfaces. La qualité de l’architecture est une question de détails et d’interventions mesurées qui protègent la conception première et les caractéristiques souvent uniques à chaque bâtiment.

Pour entretenir le bois, les opérations habituelles s’imposent : grattage, décapage et ponçage suivi de l’application de couches de peinture.

Il peut parfois s’avérer nécessaire de remplacer une partie de la colonne, l’assise à la base, par exemple. Cela n’empêche pas de conserver la majeure partie de la colonne. Pour ce faire, on place d’abord des vérins et des étais de bois pour supporter la structure. On peut ensuite dégager la colonne à réparer, puis la remettre en place une fois le travail terminé. Si la colonne repose sur un pilastre de maçonnerie de pierre ou de brique, l’intervention consistera à consolider cette maçonnerie par son jointoiement ou sa réparation avec la technique appropriée.

François Varin est architecte et directeur de la Fondation Rues principales. Cet organisme oeuvre depuis plus de 20 ans à la revitalisation socioéconomique et au développement durable des municipalités du Québec et d’autres provinces.

www.fondationruesprincipales.qc.ca